Quitaire

On trouve les formes: Quit(t)aire et Quitterie.
Quitaire était une princesse wisigothe catholique (la majorité était arien) et habitait le nord de l'Espagne (on trouve des Quitaire en Galicie et même au Portugal). Non seulement elle s'était convertie au catholicisme, mais, de plus, elle avait fait voeux de chasteté. Lorsqu'elle avait 13 ans, un prince wisigoth voulait la marier mais elle ne voulait pas. elle s'enfuit vers le nord. Elle arriva jusqu'à Aire (maintenant Aire-sur-l'Adour, dans les Landes) et là fut arrêtée et emprisonnée par le roi wisigoth y résidant, Euric. Il haïssait farouchement les catholiques et comme elle ne voulait pas renoncer à sa religion, il la décapita. J'ignore s'il l'a fait par cruauté ou s'il était un bricoleur qui n'avait pas de bourreau à sa cour. On ne discute pas seulement s'il s'agit d'un fait historique ou légendaire, mais aussi à quelle époque il est survenu. Les uns disent 478, les autres disent 472. On tombe d'accord sur le jour : Le 22 mai, car c'est la date de sa fête. Comme le jour de l'adieu à cette terre, en martyr, implique l'entrée au paradis, ça devrait bien être un 22 mai.
Bon, sa tête tombe par terre et hop, une source jaillit ! Quitaire prend sa tête dans ses mains et monte la colline (ce phénomène est repris dans plusieurs légendes. Le plus connu est, bien sûr, Saint-Denis, à Paris, mais ce n'était pas le premier). Là, elle pose sa tête par terre et hop, une autre source jaillit (elles étaient en soldes cette semaine là) ! On enterra Quitaire à cet endroit (bien arrosée, alors) et plus tard, on y construisit l'eglise Sainte-Quitaire-du-Mas qui s'y trouve toujours.
Cette église, maintenant gothique, a été construit à l'endroit d'un temple romain dédié au dieu Mars. Il est très vraisemblable qu'auparavant, il y avait un lieu de culte païen, à cause de cette source, bien sûr. L'église de Rome a beaucoup copié l'habitude des Romains de récupérer les lieux de culte des autochtones pour les combiner avec leur culte. Les Chrétiens faisaient la même chose. On "christianisait" les lieux de culte païen. Le culte de Quitaire se répandit, Aire se trouvant sur un des chemins de pèlerinage qui mènent à Compostelle. Ainsi, elle eût une certaine vénération, du Portugal jusqu'en Belgique et en Allemagne. Quitaire est la patronne de la Gascogne.

Je reviens un moment sur ce roi wisigoth car ce n'était pas le premier venu. C'était le fils de Théodoric I (mort en 453) qui résidait à Toulouse et qui a fondé le royaume wisigoth. Après sa mort, son fils Théodoric II lui succéda. Un de ses frères, Euric, se trouvant sans doute plus capable, l'assassina en 466 et gouverna le royaume, qu'il agrandit, jusqu'à sa mort en 484. Bon, direz-vous, un homme qui tue son frère a certainement commis d'autres crimes, entre autres la mort de cette pauvre Quitaire. Oui, cela se peut mais il y a deux choses qu'il ne faut pas perdre de vue :
1. Un fratricide entre des héritiers était, à cette époque, plus habitude qu'exception. Chez les Francs, les Goths, et plus tard aussi chez les Mérovingiens, dès qu'un roi avait plusieurs fils, c'était la bagarre. La façon d'hériter est aussi importante : Soit l'ainé hérite de tout, soit tous les fils reçoivent un bout du gâteau. Sachant que le plus fort s'emparera de tout le gâteau.
2. Comme les wisigoths étaient, pour la plupart, ariens, ils étaient hérétiques pour les catholiques de Rome et une belle légende est une bonne occasion de mettre sur le compte d'Euric un meurtre sanglant d'une jeune fille innocente et devote.

La légende est belle mais il n'y a aucune preuve historique de l'existence de cette princesse, ni de sa mort atroce.